
Pom d'Api
interview
L'histoire de la marque Pom d'Api
Par Alexandra Bois et Arnaud Bayeux
Au cœur d'un petit village de Vendée, à Chambretaud, s'est installée Shoe Maker, le nouveau nom de RAS Kids, entreprise à l’origine de plusieurs marques de chaussures pour enfants, dont Pom d’Api. Créée en 1973 par un cordonnier, l’entreprise de la famille Rautureau a été rachetée en 2016 par des investisseurs privés qui ont tenu à conserver l’âme et le savoir-faire si précieux et chers à cette maison. Depuis un an, les employés ont donc déménagé dans les nouveaux locaux, à quelques kilomètres seulement de l’ancien atelier de fabrication, et perpétuent la tradition initiée il y a 44 ans. Dans la cour trône une oeuvre de l’artiste Hervé Di Rosa, clin d’oeil à la passion de la famille Rautureau pour l’art, et des couloirs du bâtiment émanent des effluves de cuir et de neuf. Visite guidée et récit par Alexandra Bois et Arnaud Bayeux, respectivement PDG et DG de Shoe Maker.

Comment est née la marque Pom d’Api ?
Elle est 100% vendéenne. C’est une histoire familiale: le grand-père, qui était cordonnier, s’est mis à faire des chaussures, des sabots en premier lieu, et ils ont tout de suite eu du succès. Il n’y avait pas de marque emblématique de chaussures pour enfants à cette époque, et eux ont su aller vers les tendances, avec une originalité et un savoir-faire vendéen. Ils étaient très attachés à la solidité du produit, et à la qualité. On trouve aujourd’hui un véritable héritage de cela, une main qui se transmet, une continuité. L’entreprise est restée la même après le rachat. Nous sommes à 8 kilomètres seulement du groupe Rautureau, pour lequel nous avons beaucoup d’affection.
Quelle image aviez-vous de la marque avant le rachat Alexandra ?
Comme tout le monde, j’avais l’image d’une belle marque qu’il fallait offrir à ses enfants, surtout pour ses premiers pas. En revanche, je ne me rendais pas compte de la complexité que représente la fabrication d’une chaussure. Il faut 200 opérations pour réaliser une paire. On peut toujours enlever certaines étapes qui ne se voient pas (comme dans la doublure) mais qui sont pourtant très importantes si on tient au confort et au bien-être de l’enfant. Et puis nous nous attachons à choisir de belles matières. La chaussure est l’un des produits les plus complexes à faire, donc la chaussure pour enfant l’est encore plus. La difficulté est notamment de devoir concevoir des pointures allant du 18 au 40, avec des modèles différents, pour fille et garçon.
Vous demeurez très attentifs à la qualité et au confort, comment cela se traduit-il?
Nous faisons tester nos chaussures auprès des enfants dans la petite école à côté de Chambretaud. Nous devons être trois ou quatre marques à être encore fabricants en France, il y en a de moins à moins, et nous sommes les seuls à être validés par l’association des podologues français pour les modèles premiers pas. Il faut impérativement que la voûte plantaire soit respectée et la cheville bien tenue. Nous avons aussi un bureau d’études qui réfléchit à toutes ces problématiques, cherche sans cesse de nouvelles semelles, et valide le confort.



Vos ateliers de fabrication sont ici, avec de nombreuses machines. Quel est le processus de conception d’une paire de chaussures ?
Nous faisons d’abord une maquette de semelle en résine, puis la semelle en caoutchouc. La chaussure est conçue comme un puzzle, pièce par pièce, manuellement mais aussi à l’aide de machines de coupe, de piqûre et de montage, et grâce à des outils plus sophistiqués comme l’imprimante 3D pour fabriquer la forme. Nous faisons très attention au matériau et à l'intérieur de la chaussure pour qu'elle dure, qu'elle soit saine et confortable. Nos cuirs viennent tous d’Italie, d’Espagne et du Portugal. Il nous faut environs 2h30 pour fabriquer un prototype ou une tête de série ici en France, puis 190 000 paires sont fabriquées chaque année dans nos usines en Tunisie.
Comment est constituée votre équipe aujourd’hui ?
Sur les 180 personnes du groupe, 120 sont à la production, il y en a une vingtaine dans nos boutiques en propre, une quinzaine de techniciens travaille à la création des prototypes… C’est une petite entreprise, donc tout le monde fait un peu de tout!
De quelle manière imaginez-vous les collections ?
Nous mettons quatre mois pour faire une collection. Nous partons des concepts de modèles, et de la recherche des matières que nous faisons relativement tard dans la saison pour être au plus près de la nouveauté, et de la réalité du quotidien. C’est une course contre la montre mais nous tenons à travailler comme cela parce que de cette manière, personne n’aura les mêmes matières que nous, et nous collons encore plus à la mode adulte, sans décalage. Nous avons aussi la plupart du temps en fil rouge la thématique d’un imprimé ou d’une broderie.
Quelles sont les pièces emblématiques de Pom d’Api ?
Nous sommes très connus pour nos modèles premiers pas et pour nos sandales à brides. Elles sont solides et nos semelles en caoutchouc sont ce qu’il y a de mieux. Par ailleurs, notre marque de fabrique est aussi d’appliquer sur une chaussure en cuir des pièces de crocodile de-ci de-là, ou un peu de fourrure de lapin par touche, en jouant sur les accessoires. Nous faisons souvent du bi-matières.


Comment une marque qui existe depuis 44 ans fait-elle pour se renouveler tout en conservant son ADN ?
Nous nous réinspirons sans cesse des modes précédentes. Il y a un ou deux ans, nous avions sorti un nu-pieds avec des fraises qui existait il y a 20 ans. Nous l’avons réadapté au goût du jour ainsi qu’au niveau technique. L’ADN de Pom d’Api c’est tout son passé, mais c’est aussi ce qu’on est en train d’en faire pour le futur.
Qui est l’enfant Pom d’Api ?
Il est assez malin, drôle, avec un mélange de tradition et de modernité. Il peut se montrer classique mais il faut tout de même qu’il y ait un brin de folie. C’est un coquin. Nous exportons beaucoup donc il a aussi un côté international. Nous avons des boutiques en Belgique et en Suisse, à Moscou, au Koweït… 50% de notre chiffre d’affaires provient de l’étranger.
Comment expliquez-vous cela ?
C’est le savoir-faire à la française qui séduit tant, et aussi le fait qu’ils ne trouvent pas beaucoup de marques pour enfants dans leur pays. Notre grande force est notre qualité, parce qu’une chaussure mal conçue ne pardonne pas. Contrairement à un vêtement qui peut ne pas être parfaitement coupé, la chaussure, elle, doit être irréprochable. Les acteurs Jennifer Garner et Ben Affleck vont souvent aux Petits Chapelais à New York, une boutique multi-marques où nous sommes vendus, et ils sont clients depuis longtemps de Pom d’Api pour leurs enfants. Les princesses de Suède sont très fidèles aussi, c’est vraiment agréable.
Si Pom d’Api avait une devise, quelle serait-elle ?
Cela part d’une blague, mais ça nous ressemble assez finalement. Sur le bureau d’études, il est écrit la phrase du dessin animé Toy Story: « Vers l’infini et au-delà ». C’est cette idée d’aller toujours plus loin, de penser que quelque chose n’est pas possible mais d’y aller quand même. De ne pas rester dans une routine technique et sur nos acquis. Nous nous attachons vraiment à travailler sur des concepts de fabrication, nous nous remettons toujours en question pour faire évoluer les produits.
Vos adresses kids friendly préférées ?
La première adresse est le musée qui va être installé dans nos locaux avec tous les modèles Pom d’Api depuis 1973, notamment les sabots et les premières sandales. À Paris, les boutiques Bonton, Bonpoint, le Coffee parisien pour un brunch rue de Sablonville à Neuilly, à côté de la boutique Pom d’Api, et le musée Montmartre.
Dans notre région, il y a évidemment le Puy du Fou, les Machines de l’Île à Nantes, et L’Observatoire Tadashi Kawamata à Lavau-sur-Loire.
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